Entre devoir d’exemplarité, exigence éthique et données actuelles de la science

Les encouragements ou les incitations à la vaccination, sont devenus des injonctions qui mettent en avant un « geste de prévention qui diminue considérablement les chaînes de transmission du virus »,  érigé ensuite en « devoir d’exemplarité » et en « exigence éthique » - cf. newsletter du CNOM de mars 2021 (1) alors que les laboratoires sont toujours en phase expérimentale (mais effectivement à plus grande échelle qu’antérieurement au même stade de la mise au point des vaccins dits traditionnels). Certes, cette généralisation est autorisée par l’Agence Européenne du Médicament et par la Haute Autorité de Santé mais elle reste malgré tout soumise aux règles de déontologie, donc du Serment d’Hippocrate (2), et de la bioéthique (3). Or l’impact de la vaccination sur la diminution des chaînes de contamination n’est toujours pas évalué à ce jour car il n’y a pas encore eu le recul suffisant (et qu’il n’est pas non plus exclu que le phénomène inverse puisse survenir, éventuellement au-delà de la période post-vaccinale incompressible pendant laquelle l’immunité n’est pas encore atteinte).

Même si la campagne de vaccination a été lancée, l’AMM des vaccins n’est que conditionnelle, car il s’agit bien encore d’une phase portant concrètement sur l’efficacité et la sécurité. L’attitude la plus juste vis à vis de l’incertitude du risque au stade où nous sommes actuellement devrait nous inciter à rester vigilants, avec de la mesure et de la prudence, sans excès de confiance.

Malgré l’engouement résultant de l’espoir suscité par le développement d’une nouvelle technologie vaccinale, toute personne morale et tout professionnel de santé devrait il me semble rester bien conscient.e (tant pour lui/elle-même que pour les personnes qu’il/elle conseille) que la potentialité de survenue d’effets indésirables après quelques mois n'est pas connue à ce jour et que de nouveaux risques sont susceptibles d’être identifiés ultérieurement. Si cela devenait effectivement le cas, les actions de prévention primaire réalisées très précipitamment à grande échelle, se solderaient par une atteinte à l’intégrité corporelle avec de possibles conséquences néfastes à long terme sur la santé de la population. Par exemple, rien ne permet d’exclure d’emblée à ce jour la possibilité que certaines personnes vaccinées développent une sorte de forme de ‘Covid-long post-vaccinal’ - qui ne serait probablement même pas considérée comme une conséquence de la vaccination car même si la Haute Autorité de Santé a publié des fiches pratiques pour chacun des symptômes les plus fréquemment rapportés (aucun n’étant pathognomonique), la pathogénie du ‘Covid-long post-viral’ n’est elle-même pas encore connue.

La participation en tant que professionnel de santé ne peut donc pas être « un devoir d’exemplarité » ni « une exigence éthique qui s’impose » mais un choix, dans le respect du droit à l’autodétermination (et des contre-indications). 

Une inquiétude surgit: que pourrait devenir une tendance à confondre consentir (dire oui, accepter, adhérer volontairement), exprimer un assentiment (ne pas empêcher l’action d’autrui, de manière claire ou de manière tacite) et être asservi (avoir perdu son indépendance) ou être assujetti (être soumis).

Le 02 avril dernier, à la question de deux journalistes du Quotidien du Médecin évoquant que « Une proportion minoritaire de médecins refuse toujours de se faire vacciner. L’Ordre avait parlé d’exigence éthique. Pourquoi ne pas être favorable à une obligation légale?», le président du CNOM a répondu « Il est certain que si, dans les faits, les professionnels de santé n’étaient pas vaccinés à 100 %, dans la responsabilité éthique et morale qui est la leur, il faudrait passer par l’obligation vaccinale. Actuellement, nous sommes aux alentours de 70 % de médecins ayant reçu au moins une injection. Nous sommes une profession largement vaccinée, mais elle doit l’être en totalité. (…) Si nous n’arrivons pas à trouver l’adhésion spontanée nécessaire sur l’ensemble des métiers de la santé, il faudra la rendre obligatoire pour que nous ne soyons pas les vecteurs de contamination des patients.» (4) … alors que ni le taux réel d’efficacité ni la durée de la protection vaccinale ne sont actuellement connus et qu’il n’est pas du tout certain que les personnes vaccinées ne soient plus contagieuses … ce que précise d’ailleurs le ministère des solidarités et de la santé sur son site internet (5): 

  • Pourquoi faut-il continuer de respecter les règles sanitaires même après avoir été vacciné ? « En l’état des connaissances, les vaccins aujourd’hui disponibles ou en cours de développement réduisent la sévérité des symptômes, mais la réduction de la contagiosité est incertaine. Le port du masque reste donc nécessaire. Plus généralement, une personne vaccinée doit continuer d’appliquer les gestes barrières. »
  • Le vaccin empêche-t-il la transmission du virus ? « En l’état des connaissances, les vaccins aujourd’hui disponibles ou en cours de développement réduisent la sévérité des symptômes, mais la réduction de la contagiosité est incertaine. » 

(1) https://www.conseil-national.medecin.fr/publications/communiques-presse/vaccination-soignants-exigence-ethique

(2) « Je respecterai toutes les personnes, leur autonomie et leur volonté, sans aucune discrimination selon leur état ou leurs convictions. (…) Je n’exploiterai pas le pouvoir hérité des circonstances pour forcer les consciences », Le serment d’Hippocrate (texte revu par l’Ordre des médecins en 2012) https://www.conseil-national.medecin.fr/medecin/devoirs-droits/serment-dhippocrate

(3) la Déclaration d’Helsinki de l’Association Médicale Mondiale mentionne que « les protections garanties par la présente Déclaration aux personnes impliquées dans la recherche ne peuvent être restreintes ou exclues par aucune disposition éthique, légale ou réglementaire, nationale ou internationale » et que « les médecins ne peuvent pas s’engager dans une recherche impliquant des êtres humains sans avoir la certitude que les risques ont été correctement évalués et pourront être gérés de manière satisfaisante »

(4) https://www.lequotidiendumedecin.fr/actus-medicales/politique-de-sante/dr-patrick-bouet-president-de-lordre-des-medecins-quon-arrete-de-nous-dire-ca-ira-mieux-demain

(5)  mise à jour du 19 mars 2021 consultée le 05 avril 2021 (inchangée au 17 avril 2021), https://solidarites-sante.gouv.fr/grands-dossiers/vaccin-covid-19/je-suis-un-particulier/article/foire-aux-questions-la-conduite-a-tenir

Ces observations et ces interrogations sont-elles légitimes ?

Le 07 avril 2021, Dr Pascale MINIOU a fait part des éléments décrits ci-dessus au Président du Conseil Départemental de l'Ordre des Médecins du Finistère en lui demandant de bien vouloir lui transmettre les éléments d’information et les références dont il disposait qui pourraient rendre ses interrogations et ses observations non légitimes.

Le 12 avril 2021, elle a été informée que " Les membres du bureau ont pris connaissance de votre correspondance ci-dessous. Nous vous informons que nous avons relayé cette dernière auprès du Président du Conseil National ".